Marc Endeweld
Depuis novembre dernier, le juge d'instruction Serge Tournaire, dont une précédente enquête avait amené Nicolas Sarkozy à être condamné un an de prison ferme pour ses comptes de campagne 2012 (affaire "Bygmalion") enquête sur les comptes de campagne d'Emmanuel Macron. Bien qu'officiellement validés en 2018, ceux de 2017 recèleraient des avantages en nature non déclarés (notamment de la part du cabinet Mac Kinsey) et des ristournes suspectes. Devant les caméras, Emmanuel Macron fait bonne figure mais en coulisses, la macronie s'inquiète.
Fin novembre, la nouvelle a fait l’effet d’une bombe dans la macronie : le Parisien a dévoilé que trois juges d’instruction, nommés par le Parquet National Financier (PNF), enquêtent sur les conditions d’attribution par l’État des contrats McKinsey qui ont défrayé la chronique durant la campagne présidentielle (le PNF avait alors ouvert une enquête préliminaire). Les trois juges d’instruction s’intéressent aussi à des soupçons de financement illégal des campagnes électorales d’Emmanuel Macron en 2017 et en 2022.
Si le PNF n’a pas souhaité communiquer dans un premier temps auprès des journalistes du Parisien, il a fini par publier ce communiqué technique : « Suite à plusieurs signalements et plaintes d'élus et de particuliers, une information judiciaire a été ouverte le 20 octobre 2022, notamment des chefs de tenue non conforme de comptes de campagne et minoration d'éléments comptables dans un compte de campagne, portant sur les conditions d'intervention de cabinets de conseils dans les campagnes électorales de 2017 et 2022 ».
Signé par le procureur de la République financier Jean-François Bohnert, ce communiqué évoque également l’ouverture d’une seconde instruction, le lendemain de la première : « Suite à plusieurs plaintes d'élus et d'associations, une information judiciaire a été ouverte le 21 octobre 2022 des chefs de favoritisme et recel de favoritisme ».
Le juge qui fait peur à la macronie
La première « information judiciaire » (qu’on qualifie parfois d’ « instruction ») sur les comptes de campagne est dirigée par le juge Serge Tournaire, un symbole à lui tout seul. Habitué des affaires politiques, c’est lui qui avait engagé les poursuites contre Nicolas Sarkozy dans l’affaire des soupçons de financement libyen de sa campagne de 2007. C’est lui également qui avait mis en examen l’ancien président dans « l’affaire Bygmalion » qui était en fait l’affaire du financement illégal de sa campagne de 2012. C’est dire si ce magistrat instructeur est compétent dans le domaine des campagnes électorales.
Autre caractéristique qui inquiète la macronie : l’homme n’a pas froid aux yeux. En pleine campagne présidentielle en 2017, il n’avait pas hésité à mettre en examen François Fillon pour l’emploi fictif de sa femme Pénélope. Et par le passé, il a également traité de « grosses » affaires : Tapie, Balkany, Ghosn ou Dassault…