Corruption chez Areva
Off décrypte en exclusivité le rapport sur le rachat d’Uramin en Centrafrique (2-2)

Marc Endeweld

Révélé mercredi par Off Investigation, le rapport de la brigade financière sur la gestion des actifs miniers d'Areva en Centrafrique suite au rachat d'Uramin en 2007 s’avère accablant pour le groupe nucléaire français, rebaptisé Orano. Les enquêteurs détaillent une corruption généralisée en Centrafrique, menée par le président d’alors François Bozizé, à laquelle le groupe français se soumet sans barguigner. Malgré les réticences de plusieurs de ses cadres.

Pour Areva, le dossier Uramin en Centrafrique est un cas d’école. Datant d’il y a une quinzaine d’années, c’est même l’exemple parfait de tout qu’il ne faut plus faire en matière de  « conformité » (compliance en anglais), cet alpha et oméga de la lutte contre la corruption made in US désormais imposé par le Département de la Justice américain (DOJ) aux multinationales du monde entier. À la lecture des 55 pages du rapport de la brigade financière que nous évoquions ici, toutes les lignes rouges semblent avoir été franchies sur le projet de Bakouma.

Tout avait mal commencé pour Areva en Centrafrique. En effet, après la fin de l’OPA d’Areva sur Uramin, cette société minière canadienne, la République centrafricaine fait savoir aux dirigeants du groupe nucléaire français qu’elle ne reconnaît pas les effets juridiques du rachat. Concrètement, les autorités locales considèrent que les droits miniers appartenant à Uramin, devenue filiale d’Areva en août 2007, ne peuvent être la propriété du groupe Areva.

« Leur problème c’était de trouver du cash »

Un vrai chantage : « les autorités centrafricaines disposaient d’un pouvoir de nuisance et d’entrave suffisamment fort qui ont conduit le groupe Areva à tenter de négocier et de satisfaire les attentes du chef de l’État », qui est alors François Bozizé, constatent les policiers de la brigade financière dans leur rapport. Au cours de leur enquête, les policiers demandent à Xavier Rincel, l’ancien directeur juridique d’Areva, si le groupe nucléaire français a « payé des montants indus à la République Centrafricaine ». Sa réponse est sans équivoque : « Oui. Car normalement nous n’aurions pas dû avoir à repayer mais les conditions politiques ont fait qu’il a été préférable de négocier pour accéder à la mine ». Lors d’une autre audition, il ajoute : « C’est clairement du cash qu’ils [NDR : les autorités centrafricaines] veulent (…) C’est un pays, la République Centrafricaine qui n’est pas un pays de droit (…) leur problème c’était de trouver du cash ».

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