Le pape des migrants est décédé

Le pape François est mort lundi 21 avril 2025 à l’âge de 88 ans | photo Alessandra Tarantino AFP

Premier pontife non européen depuis près de 1000 ans, le pape François est décédé lundi 21 avril à Rome. Il était âgé de 88 ans. Argentin, il était en froid avec Emmanuel Macron après s’être notamment illustré par sa défense des migrants et des palestiniens.

La scène avait marqué les esprits. Et les médias de droite anti-migrants. En septembre 2023, lors d’une visite à Marseille, le pape François s’était violemment élevé contre les violences faites aux migrants en Mediterrannée. Dans un contexte d’hostilité croissante envers les candidats à l’exil en Europe, il avait notamment appelé à une « responsabilité européenne » face au phénomène migratoire et martelé que les migrants « risquent leur vie en mer ». La veille, il avait dénoncé le sort des migrants en Méditerranée, critiquant « l’indifférence » et « la peur ».

Une sacrée pierre dans le jardin de la macronie, qui s’illustrait alors par sa complaisance envers l’extrème droitisation du débat public, comme nous le racontions dans notre documentaire « Macron, en marche vers l’extrême droite ».

« Macron, en marche vers l’extrême droite », Thierry Vincent, William Gaye, Off investigation, juin 2024)

Les 7 et 8 décembre dernier, le pape avait snobé la cérémonie de réouverture de la cathédrale Notre-Dame, à Paris, grand moment de communication Macroniste devant des chefs d’Etats du monde entier.

Au-delà de sa sensibilité aux souffrances humaines ici évoquées, le pape François décida d’apporter son soutien, en juin 2023, à la famille du fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, alors emprisonné au Royaume-Uni et menacé d’extradition aux Etats-Unis. « Ce matin, le pape a nous a accordé une audience privée, à nos enfants et à moi. Nous sommes bouleversés », écrivait, émue, la femme de Julian Assange sur les réseaux sociaux, le 30 juin 2023.

Pour mémoire, la Confédération des évêques de France, qui reconnaît l’autorité du pape et ne peut pas prendre des décisions contraires aux orientations du Vatican, avait, la même année, « fait le siège de l’Elysée pour que Julian Assange, alors sous le coup d’une menace d’extradition aux Etats-Unis, décroche l’asile politique en France, en vain » (Le Canard enchaîné, novembre 2024). Episode qu’Emmanuel Macron s’est gardé de rappeler ce 21 avril, lors de son hommage au souverain pontifical François depuis Mayotte.

En défense des Palestiniens… et des Israéliens

Autre prise de position courageuse : ces derniers mois, François s’était à plusieurs reprises alarmé du sort fait par le gouvernement Netanyahou aux Palestiniens de Gaza. La veille de sa mort, un de ses représentants avait lu son message urbi et orbi à Rome, dénonçant notamment « une situation humanitaire dramatique et ignoble » tout en précisant : « Je suis proche des souffrances des chrétiens de Palestine et d’Israël, ainsi que de tout le peuple israélien et de tout le peuple palestinien. » 

Le pape s’est inquiété pour « le climat d’antisémitisme croissant qui se répand dans le monde entier », mais « en même temps », il a confié que ses « pensées vont à la population et en particulier à la communauté chrétienne de Gaza, où le terrible conflit continue de semer la mort et la destruction et de provoquer une situation humanitaire dramatique et ignoble. » D’où cet appel, « J’appelle les belligérants : cessez le feu, que les otages soient libérés et que l’aide précieuse soit apportée à la population affamée qui aspire à un avenir de paix ! ».

À n’en pas douter, une fois le deuil passé, les milieux catholiques de droite, comme ceux de Vincent Bolloré ou Pierre-Edouard Stérin, seront soulagés que ce pape soucieux du sort des migrants et des civils palestiniens ait quitté la scène. La bataille pour le choix d’un nouveau souverains pontife sera bientôt lancée. Nul doute que certains militeront pour la nomination d’un nouveau pape plus favorable à l’impérialisme occidental, voire plus traditionaliste.

L’article que vous venez de lire est en accès libre. Si vous l’avez trouvé utile, sachez que notre mission ne s’arrête pas là. Depuis avril 2025, nous publions des enquêtes exclusives réservées à nos abonnés – des sujets que vous ne lirez nulle part ailleurs, menés en toute indépendance. Soutenez un journalisme libre, rigoureux, et sans concession. Donnez nous les moyens de continuer à publier ce que d’autres préfèrent taire : abonnez-vous dès maintenant à notre offre écrite.
On est des millions. Ensemble, on peut y arriver.