Jean-Baptiste Rivoire : Bonsoir Sophie, qu'est ce qui t'a amenée à t'intéresser à ce sujet?
Sophie Benard : C'est par exemple le fait de savoir qu'il y a 219 000 femmes chaque année qui sont victimes de violences physiques ou sexuelles et qu'elles sont moins d'une victime sur dix à porter plainte. En ce qui concerne les viols ou les violences sexuelles, c'est une agression sexuelle sur huit ou dix qui fait l'objet d'une plainte. Et parmi ces plaintes, seulement 2 % aboutissent à une condamnation.
Jean-Baptiste Rivoire : Une écrasante majorité des agresseurs ne sont jamais condamnés ?
Sophie Benard : Exactement, ils ne sont même pas inquiétés.
Jean-Baptiste Rivoire : Quand tu as commencé à t'intéresser à ces histoires de plaintes, qu'as tu constaté ?
Sophie Benard : Dans les commissariats, les victimes sont souvent accueillies dans des bureaux qui ne sont pas fermés, où il y a du passage, où d'autres officiers passent dans les bureaux. Et parfois, en arrivant au commissariat (à cause du plan Vigipirate), les victimes sont obligées de donner la cause de leur plainte dans la rue. Donc il n'y a aucune confidentialité. Et une posture professionnelle souvent inadaptée, liée aux réflexions que font les agents de police. Par exemple, je fais témoigner une jeune femme, Adrienne. Venue porter plainte pour « viol en réunion », elle s’est entendu dire qu’elle n’aurait « pas du se mettre en danger comme cela », tout simplement parce qu'elle s'était rendue à l'endroit où les faits avaient eu lieu. Qu’elle aurait « dû se douter de ce qui allait se passer ».