Marc Endeweld
En novembre 2022, la justice ouvrait deux instructions susceptibles de questionner la sincérité des comptes de campagne 2017 et 2022 d'Emmanuel Macron, notamment confiées au juge Serge Tournaire. Parmi les points qui posent question : l'existence de nombreux paiement en "cash" entre février et avril 2017, et des prêts de 11 millions d'euros obtenus en avril 2017 grâce à l'intervention de personnalités liées de près ou de loin à la vente d'Alstom aux américains en 2014. Si la macronie fait bonne figure devant les caméras, elle se montre fébrile en coulisses.
En politique, l’argent est le nerf de la guerre. Rien ne peut se faire sans. Mais en France, contrairement aux États-Unis, les dons et les avantages en nature des entreprises privées sont interdits depuis 1995. Seuls, les dons des particuliers sont autorisés. Ils sont limités à 4600 euros (une seule fois) pour un candidat à la présidentielle et 7500 euros (par an) pour un parti politique. En septembre 2016, l’ancien banquier Christian Dargnat (ancien dirigeant de la BNP), président de l’association de financement d’En Marche ! en charge de recueillir les précieux fonds, résume dans un courriel la stratégie de collecte du mouvement d’Emmanuel Macron : « Quand on sait que les dépenses de campagne présidentielle sont limitées à 22 millions d’euros, et que nous pourrions contracter un prêt bancaire (à hauteur de 9 millions) remboursé si le candidat dépasse le seuil des 5 % aux élections, il nous reste donc à “trouver” 13 millions. Si l’on arrondit à 10 millions le budget à trouver, il faut donc obtenir des dons de 1333 personnes à 7500 euros chacune ».
Rien ne va se passer comme prévu
À l’automne 2016, il restait donc à l’équipe Macron à « trouver » entre 10 et 13 millions d’euros. Une paille ! D’autant que rien ne va se passer comme prévu. Car contrairement à une idée reçue largement répandue par les médias, le candidat Macron n’a pas réussi à rassembler suffisamment d’argent au cours de sa collecte de dons officielle pour assurer le financement de sa campagne électorale comme je l’ai expliqué dans mon livre Le Grand Manipulateur publié en avril 2019.
Au final, les dons des particuliers, notamment ceux issus des « grands donateurs », ne permettra de couvrir que moins d’un quart du budget de la campagne.
« Trou » de trésorerie
Il suffit de se reporter aux comptes du candidat Macron déposés en juillet 2017 auprès de la commission chargée de les contrôler pour le constater. Les recettes officielles sont décomposées de la manière suivante : seulement 1 million d’euros de dons venant de l’association de campagne, et « seulement » 4,2 millions d’euros de dons issus d’En Marche !, auxquels il faut ajouter les 10,7 millions d’euros de prêts qui ne seront obtenus qu’en toute fin de campagne, et 408 000 euros en nature, soit un budget total de 16,8 millions d’euros. Les dons de particuliers n’ont donc permis au candidat Macron de ne récupérer que 5,2 millions d’euros. Une somme rassemblée en grande partie au cours de l’année 2016 et, en fait, déjà largement consommée début 2017. Sur le papier, il y a donc un important « trou » de trésorerie dans la campagne Macron entre janvier et avril 2017. Une période où d’importantes dépenses ont pourtant été engagées.