Le fabricant de voitures franco-italiano-américain issu de la fusion entre PSA et Fiat-Chrysler et dirigé par Carlos Tavares a fait état de résultats financiers tout à fait exceptionnels en 2023. Des milliards d’euros de profits qui viendront d’abord enrichir les actionnaires. Voici comment, en l’espace de quelques années à peine, Stellantis est devenue une machine à privatiser les bénéfices réalisés par l’ensemble des salariés et acteurs du groupe.
Avec son sourire éclatant, son humour et sa grande modestie apparente, Carlos Tavares a tout du dirigeant sympa que chacun aimerait avoir pour patron. Mais derrière les lunettes de ce centralien, se cache un chasseur de coûts insatiable, un véritable « psychopathe de la performance » comme il se définit lui-même. En témoignent les résultats financiers du constructeur Stellantis que Carlos Tavares dirige : « Stellantis réalise un record en chiffres d’affaires net, bénéfice net et free cash flow industriels pour l’année 2023 » annonce le groupe.
Dans le détail, Stellantis a dégagé une marge opérationnelle de 12,8% (ce qui est extrêmement élevé dans le monde de l’automobile) et un bénéfice net de 18,6 milliards d’euros, en hausse de 11% sur un an. Ainsi, 6,6 milliards d’euros vont être redistribués aux actionnaires « sous forme de dividendes et de rachat d’actions, soit une hausse de 53 % par rapport aux 4,3 milliards d’euros reversés en 2022 » indique le constructeur. Quant aux salariés, ils auront droit à 1,9 milliard d’euros « en reconnaissance des performances et de l’implication des collaborateurs à travers le monde » fait savoir un autre communiqué. Le calcul, effectué par la CFDT du constructeur automobile, est vite fait : sur les 8,5 milliards d’euros qui seront redistribués au titre des résultats 2023, seulement 21,5% seront captés par les salariés et 78,5% par les actionnaires. Toujours selon la CFDT, la répartition avait été de 33,3% pour les employés et de 66,6% pour les actionnaires en 2022. Mais si l’on remonte à l’époque qui précède Stellantis, lorsque l’entreprise se nommait encore PSA, le calcul de la répartition des profits était le suivant d’après la CFDT : 62,7% pour les salariés, 37,2% pour les actionnaires…
Une évolution que le syndicat a du mal à s’expliquer : « C'est un très mauvais signe qu'envoie le groupe Stellantis aux salariés en accentuant encore l’écart de redistribution entre les salariés et les actionnaires » souligne la confédération ; «Partageons mieux les richesses » renchérit Laurent Oechsel, délégué syndical central CFE-CGC de Stellantis. « On ne comprend pas pourquoi l’intéressement était de 4300€ l’an dernier mais de 4100€ cette année, alors que l’on a surperformé » signale le représentant des cadres.
« Coupes drastiques dans les effectifs… »
Laurent Oechsel, délégué syndical central CFE-CGC de Stellantis
Outre l’augmentation de rémunération des actionnaires, celle du patron n’est vraiment pas passée inaperçue non plus. Pour 2023, Carlos Tavares entend en effet s’octroyer une rémunération de 36,5 M€, en hausse de 55% sur un an. Sachant que l’annonce de ses émoluments en 2022 avait déjà suscité des commentaires réprobateurs jusqu’à l’Elysée ! « Le salaire du patron n’est pas un problème à partir du moment où il donne de bonnes orientations » annonce pourtant Laurent Oechsel, « mais cette performance se fait en réalisant des coupes drastiques dans les effectifs. Et c’est encore plus brutal pour nos collègues aux Etats-Unis » croit savoir le représentant syndical.