Pour la première fois, les députés ont adopté une loi visant à interdire les produits contenant des PFAS, ces polluants éternels dangereux pour la santé et que l’on trouve partout. Une première victoire sur une longue route, où le gouvernement, la majorité, LR et le RN se sont révélés à la botte des lobbies industriels pro-PFAS.
« Victoire ! » C’est par ce cri de joie que Les Ecologistes ont annoncé sur X (anciennement Twitter) l’adoption par les députés de la loi visant à lutter contre les PFAS quelques secondes à peine après le vote. La victoire est propre car à l’unanimité. Un bémol : seuls 213 députés ont participé au vote. Et si 186 d'entre eux ont voté contre les PFAS, 27 autre se sont abstenus. Parmi eux, la totalité des députés RN et LR qui siégeaient.
Ce texte, qui a fait l’objet d’âpres débats, comporte trois points clés visant à protéger les citoyens et la collectivité des PFAS, ces polluants chimiques éternels qui ont envahi nos vies. Le premier d’entre eux est l’interdiction, à compter du 1er janvier 2026, de la fabrication, l’importation, l’exportation et de la vente de cosmétiques, produits de fart (pour les dessous des skis) ou textiles d’habillement contenant des PFAS. Des dérogations dans le temps sont néanmoins prévues pour les vêtements de protection professionnels (pompiers, militaires…). A partir de 2030, ce seront tous les textiles (même les rideaux !) contenant des PFAS qui seront interdits.
Le principe du pollueur-payeur (enfin) instauré
Le projet de loi instaure également la mise en œuvre du principe du pollueur-payeur. Cette avancée est de taille tant l’injustice et l’impunité prévalent en matière de pollutions industrielles et d’atteintes à l’environnement. Concrètement, les industriels qui rejettent des PFAS dans l’eau devront s’acquitter d’une redevance aux agences de l’eau et contribuer ainsi à dépolluer les milieux qu’ils ont eux-mêmes souillés. Toutefois, aucune solution n’a été trouvée pour financer le nettoyage des pollutions anciennes, dont certaines remontent parfois à des décennies.
Depuis que la nocivité des PFAS est connue, on observe toutefois que les fabricants de PFAS sont de plus en plus la cible de procédures judiciaires liées aux pollutions dont ils sont suspectés d’être à l’origine. La dernière en date a fait du bruit courant mars 2024 : la métropole de Lyon, présidée par l’écologiste Bruno Bernard, a lancé une vaste offensive judiciaire contre deux entreprises de la « vallée de la chimie », au sud de Lyon, massivement empoisonnée aux PFAS. Les deux sociétés sont Arkema France et Daikin Chemical France, suspectées d’avoir une jolie part de responsabilité dans le désastre sanitaire et environnemental qui se profile.
Aux industriels de démontrer que leurs produits ne sont pas dangereux
Comme l’a déclaré Bruno Bernard dans Le Monde au moment de l’annonce de cette offensive judiciaire : « Le périmètre situé autour de la “vallée de la chimie” est sans doute le secteur le plus pollué d’Europe aux PFAS. Jusqu’à présent, les industriels affirment qu’ils sont toujours restés dans les limites réglementaires, que leurs produits de substitution ne présentent aucun danger. Bref, ils déclinent toute responsabilité. Moi, je veux qu’on inverse la charge de la preuve. Respecter le règlement, c’est très bien, mais cela ne suffit pas. Ils doivent démontrer que leurs produits ne sont pas dangereux. S’ils sont à l’origine de ce gigantesque problème de santé publique, il va falloir rendre des comptes ».
Il n’y a pas que la métropole de Lyon qui passe à l’attaque. On peut citer l’Ong Générations Futures, très active dans la lutte contre les PFAS, qui, en juin 2023, a déposé des plaintes contre X pour des faits de pollution des eaux et d’atteinte à l’environnement et aux poissons dans trois régions (Hauts-de-France, Bourgogne Franche-Comté et les Pays-de-Loire).
Rechercher les PFAS dans l’eau potable : un enjeu de santé publique
Troisième point clé du texte de loi adopté à l’assemblée nationale : l’obligation faite aux pouvoirs publics de rechercher les PFAS lors des analyses d’eau potable. Cette recherche sera de toutes les façons rendue obligatoire pour 20 PFAS par l’Europe à partir de 2026.
Mais il y a un détail où le diable est susceptible de se nicher : il existe environ 12 000 PFAS sur terre et un décret devra définir ultérieurement une liste non limitative des PFAS qui seront recherchés dans les eaux potables. Voilà qui promet de belles empoignades dans les territoires comme le montre ce qui se passe à Salindres, dans le Gard.